Le fondateur du Cavalier Bleu Jean Durpoix s’en est allé tranquillement dans la nuit du 10 au 11 janvier 2017. Une mauvaise grippe et une insuffisance respiratoire chronique qui l’affaiblissait ces derniers mois auront eu raison de ses forces malgré toute l’assistance de l’hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis).
Né le 2 juillet 1928, Jean avait fêté ses 88 ans l’été dernier.
Jean avait fondé en 1972 ‘Le Cavalier Bleu’ du nom de la MJC où le club se réunissait à l’époque.
A la fin des années 1970 et au début des années 1980, alors que Jean prenait les enfants au club ensemble et leur inculquait les rudiments du jeu, Drancy devenait également avec Aubervilliers, un rendez-vous important pour jouer des tournois rapides, souvent avec handicap de temps.
Il n’y avait pas de Elo pour les amateurs et l’on parlait alors de joueurs de première, deuxième etc. catégorie.
C’était la grande époque des appariements sans ordinateur et d’une organisation où les prix par catégorie étaient rois. Jean avait été fasciné par l’ambiance du club parisien Caïssa, mais se déplacer à Paris pour jouer prenait trop de temps, alors il s’était lancé.
Ses talents d’organisateur que ce soit dans des simultanées publiques à Drancy ou dans des tournois pour le Téléthon n’étouffaient en rien le joueur.
Ainsi, il n’a pas raté la simultanée donnée par le candidat au titre mondial Viktor Kortchnoï en 1974 à Paris (sur la photo, Jean est face à la chaise) ; il fallait l’entendre conter sa partie et ses impressions sur cet affrontement. Voir des joueurs soviétiques en chair et en os était si rare en France et Kortchnoï était déjà une masse qui impressionnait.
Avec le temps, Jean Durpoix a pu construire une base – enseigner aux jeunes – tout en essayant de monter avec les moyens du bord une équipe. Après de longs efforts, l’apothéose est arrivée pour Drancy : le club s’est hissé dans la plus haute division en 1992 avec comme piliers le champion de France Nicolas Giffard et la doublette ukrainienne Komarov et Legky, tous trois restés plus de vingt ans fidèles au club.
Jean ne disait jamais « l’équipe une ». Il disait « mes joueurs » comme il aurait dit « mes enfants » (photo avec Rémi Said né en 1994 et toujours au club). Bien sûr il fallait payer les maîtres et c’était la débrouille car comme la plupart des clubs, les subsides publiques étaient bien rares. Jean avait le bagout et le chic pour attirer de jeunes joueurs en devenir : ce fut le cas pour Éric Prié, le tout jeune Laurent Fressinet et d’autres.
Car sa carrière de représentants en vins lui avait permis de comprendre la psychologie de son interlocuteur avant même qu’il ait ouvert la bouche. Et dans les parties rapides de 10 min qu’il affectionnait tant, il donnait toujours du « mon cher ami » pour mieux endormir l’adversaire.
Venir au club le mercredi et le samedi était vital pour lui. Il sortait, prenait sa voiture et rentrait quand il fallait préparer la soupe. Et quand il ne venait pas, c’est qu’il était malade.
Chaque soir d’interclubs, alors même qu’il n’était plus aux commandes depuis 2011, Jean était avide de connaître les résultats des interclubs échiquier par échiquier même quand il ne connaissait pas certains joueurs. Il collectionnait d’ailleurs les résultats de tout le parcours de Drancy aussi bien dans Europe Échecs des années 1990 quand les résultats détaillés y étaient donnés par poule et par groupe que dans d’obscurs bulletins de la ligue d’Île-de-France pour les critériums.
L’organisation du Top 12 au château de Ladoucette en juin 2016 fut au final une consécration de son travail et une suite logique dans la vie du Cavalier Bleu. La mairie avait depuis longtemps stabilisé ce drôle de cheval en lui attribuant un local à lui seul – chose rare en région parisienne – et Jean était aux anges : il suivait et encourageait le Cavalier Bleu tout en prédisant souvent avec justesse les résultats (ici trois présidents sur les quatre qu’a compté le Cavalier Bleu : Daniel Buchy, Jean Durpoix et l’actuel Manuel Casas au club, en septembre 2015).
Tous les membres du club s’associent à la peine de sa famille et en premier lieu à sa femme Christiane et à ses deux enfants, Chantal et Philippe.
Les obsèques de notre regretté président fondateur auront lieu le mercredi 18 janvier à 10 h en l’église Sainte-Louise-de-Marillac de Drancy, face à la mairie. Une cérémonie sera célébrée en sa mémoire et ses nombreux amis lui rendront hommage. Paix à son âme.